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Paysages de verre

Les photographies d’Eric Aupol semblent résulter d’une parfaite alchimie, celle de l’ombre et de la lumière et du rendu des matières. Tous ces éléments constituent la condition nécessaire mais sans doute pas suffisante à la réalisation d’une image de qualité. C’est la conjonction de ces paramètres avec un contexte riche en significations qui donne à l’image toute sa profondeur. Lieux de mémoire, et de transition, les espaces choisis par l’artiste semblent la plupart du temps avoir été désertés, figés dans l’attente d’un retour possible. L’humain a laissé son empreinte sur le paysage mais son absence est indéniable.

L’apparente lisibilité des œuvres d’Eric Aupol constitue un leurre. Le spectateur inattentif discernera au premier regard ce qu’il croit être un paysage naturel se référant sans conteste à la grande tradition picturale des écoles nordiques des siècles passés. Les tons froids, les jeux de reflets et des transparences à la manière d’un glacis concourent à renforcer cette évocation. Mais sommes-nous face à un paysage ou face à une nature morte ?

Rien de plus artificiel en effet dans ces photographies réalisées dans un site de recyclage du verre. Façonnées par l’homme, ces montagnes de verre sont le fruit d’une accumulation de pare-brises de voitures. Véritable coupe géologique d’une histoire de la consommation, ces couches reflètent le fonctionnement de nos sociétés en prise avec la surabondance des matières et le manque des sources énergétiques.

Fabienne Fulchéri
à propos de « Paysages de verre »
catalogue de l’exposition « Pleins Phares » , éditions Hazan, 2008

  English 

Paysages de verre / Glass Landscapes


Eric Aupol's photographs seem to result from a perfect alchemy, the one of the shadow and the light and of the rendering of matters. All these elements constitute the necessary condition but probably not sufficient in the realization of a quality image. It is the convergence of these parameters with a rich context in meanings that gives the image its depth. Place of memory, and of transition, the spaces chosen by the artist seem mostly to have been abandoned, frozen in anticipation of a possible return. The human has left its mark on the landscape but its absence is undeniable. 

The apparent legibility of Eric Aupol's works constitute an illusion. The inattentive spectator would discern at first sight what he believes is a natural landscape, undoubtedly referring to the great pictorial tradition of northern schools from the past centuries. Cold tones, games of reflections and transparencies in the manner of a glazing, contribute to reinforce this evocation. But are we facing a landscape or a still life? 

Nothing more artificial indeed in these photographs taken in a glass recycling site. Shaped by human, these glass mountains are the result of a car windscreens accumulation. Real geological section of a history of consumption, these layers reflect the functioning of our societies confronted with the overabundance of materials and lack of energy sources. 

Fabienne Fulchéri
about "Glass Landscapes "/"Paysages de verre", 
exhibition catalog « Pleins Phares »,  Hazan edition, 2008