Français

Mar de Plastico, Andalousie, août 2009

La série présentée ici trouve son origine dans une série de photographies réalisée à Soissons, sur le site de l’usine  Saint-Gobain. Le site entrepose ses déchets de verre (pare-brises, flacons, matériel pharmaceutique) sur un terrain vague jouxtant le lieu de fabrication, et le paysage ainsi reconstruit se modifie régulièrement, au gré des chargements et déchargements des camions.
Les modifications visuelles qu’engendre ce type de stockage redéfinissent la notion de paysage, intégrant des éléments construits (et détruits) dans  un territoire essentiellement rural.

Au delà de la confrontation nature / culture, c’est bien une nouvelle vision de l’espace environnant qui est mise en place, dans un rapport de recouvrement. Si des traces du paysage naturel demeurent, si la structure même du paysage originel modèlent la disposition de ces nouvelles strates artificielles, c’est, au final, cet aménagement de l’espace qui est immédiatement visible, et qui fait signe de la surconsommation actuelle.

Je souhaite continuer de repérer, sur l’ensemble du territoire européen, ces nouvelles données du territoire.

Lors d’un séjour récent en Andalousie, entre Alméria et Motril, la vue des invernaderos , ces immenses serres de plastique où se produit 25% de la culture maraîchère européenne, m’a amené à faire des photographies qui reprennent en compte ce bouleversement visuel et écologique qu’engendre la production de masse. Il faut un temps, pour se persuader que ce sont bien des centaines de kilomètres de plastique que l’on a sous les yeux. La matière même du paysage se dote d’une étrangeté que la photographie peut saisir.

Le paysage environnant est l’un des plus arides et des plus désertiques d’Europe. Les enjeux économiques de la production de fruits et légumes remodèlent là encore le paysage initial, en bouleversant les habitudes écologiques liées à cet environnement (pesticides, assèchement des rares nappes phréatiques, pollutions, envahissement de l’espace par le plastique). Les rapports sociaux se modifient aussi considérablement, car sous ces serres, ce sont près de 8000 personnes qui travaillent (dont 75% de clandestins), sous une température avoisinant les 50° au mois d’août...

Eric Aupol


  English 

Mar de Plastico, Andalusia, August 2009

The series presented here originate in a series of photographs made in Soissons, at the site of the Saint-Gobain factory. The site stores its waste of glass (windshields, flasks, pharmaceutical equipment) in a vacant lot adjacent to the place of manufacture, and the landscape built like this is changing regularly, following the loading and unloading of trucks.
The visual changes that generates this type of storage redefine the concept of landscape, incorporating built (and destroyed) elements, in a mainly rural area.

Beyond the nature / culture confrontation, it is indeed a new vision of the surrounding space that is established, in a covering up relation. If traces of the natural landscape remain, if the structure itself of the original landscape shapes the placement of these new artificial strata, in the end, it is that spatial layout that is immediately visible, and indicates the current over-consumption.

I wish to continue to detect, on the whole European territory, these new data of the territory.

During a recent stay in Andalusia, between Almeria and Motril, the sight of the invernaderos, these huge plastic greenhouses where 25% of the European market gardening is produced, led me to take photographs which take into account this visual and ecological disruption that mass production engendered. It takes a while to be convinced that these are hundreds of miles of plastic that was under the eyes. The substance itself of the landscape provides a strangeness that photography can capture.

The surrounding landscape is one of the most arid and desert of Europe. The economics stakes of the fruits and vegetables production reshape there again the initial landscape, upsetting the ecological habits related to this environment (pesticides, draining of the scarce groundwater, pollution, invasion of the area by the plastic). Social relations also change dramatically, because under these greenhouses, there are nearly 8,000 people working (including 75% of illegal immigrants), at a temperature close to 50 C° in August ...

Eric Aupol